Michael Jackson est un chanteur, chorégraphe et compositeur américain qui… Vous savez déjà tous qui c’est. Ce qui était moins connu avant il y à quelques années, c’est qu’il était un énorme fan de jeux vidéos et a collaboré avec Sega a plusieurs reprises, s’impliquant la plupart du temps personnellement dans les projets.
Disclaimer : je ne pense pas que les accusations d’agressions sexuelles sur mineur soient fondées, pour plein de raisons que je ne vais pas expliciter ici (pas mal de documentaires en parlent déjà). Je n’aurai pas traité ce sujet si je pensais que c’était le cas. Officiellement, Michael Jackson a été innocenté en 2005 : restons sur ce postulat pour la suite de l’article.

En 1988 sort le film Moonwalker, une curieuse compilation de clips entourant un court métrage lunaire où Michael Jackson est une sorte d’entité surnaturelle combattant un dealer de drogue joué par Joe Pesci. La seule chose vraiment à retenir pour la postérité est la partie « Smooth Criminal », qui sert de clip a la chanson et en est sans conteste le meilleur segment. Michael Jackson contacte Sega personnellement pour en faire une adaptation officielle.
Comme l’explique en interview Al Nielsen pour le site Time Extention, Michael Jackson, étant déjà un grand fan de jeu vidéo, était complétement impliqué dans le projet. Lors de l’entretien, Michael reconnu instantanément Altered Beast en voyant la boite de la Megadrive que tenaient les officiels de Sega. D’après Al Nielsen, il avait des des observations au niveau des situations ou du gameplay auxquelles seul un gamer aurait pensé. Prévu pour durer un petit quart d’heure, l’entretien dura une heure tant il était passionné, ce qui était très inhabituel selon son garde du corps, qui déclara « c’est la première fois que je le voit faire ça, il doit vraiment aimer être ici ». Al Nielsen rencontre Michael Jackson plusieurs fois par la suite pour avoir son avis sur chaque étape du projet. De cette collaboration naitrons deux jeux : Moonwalker sur arcade, et Moonwalker sur consoles, sortis en 1990, qui sont tous deux complémentaires.

Il n’y a pas grand chose à dire sur la version arcade, c’est un jeu classique de l’époque destiné à manger les pièces des infortunés assez téméraire pour essayer d’en voir la fin. Il est très beau, se joue bien, et la bande son est composée de remix 16 bits des plus grands tubes du roi de la pop. La particularité est qu’il peut se jouer a 3, ce qui permet d’avoir trois Michael de couleurs différentes dont un rouge qui prédit Blood on the Dance Floor et le costume noir de You Rock My World de dix ans. En utilisant un power-up, il peut se transformer en robot qui tire des rayons lasers avec les yeux, comme dans le film. Cette version est un peu oubliée maintenant, la faute a un loop de gameplay très répétitif et des décors tout du long assez similaires. A noter d’ailleurs que les deux jeux mettent en scène le costume de la séquence « Smooth Criminal », les créateurs ayant bien compris quelle partie est la plus intéressante.






La version Megadrive (et par extension Master System, mais nous ne parlerons que de la première par commodité) est beaucoup plus populaire. La bande son est similaire a la version arcade, mais le déroulement est complétement différent, proposant ici un mélange d’action/plateforme (similaire au premier Shinobi) où Michael devra sauver les enfants kidnappés par Mr Big, le vil vendeur de drogue (pléonasme?). Outre son coup de pied dévastateur qui envoie les ennemis voler en dehors de l’écran, il pourra via sa barre de magie qui fait aussi office de barre de vie infliger diverses attaques qui en en consommant une quantité le rendront plus ou moins vulnérable. Il peut lancer son chapeau avec un peu de barre, où faire danser/mourir tous les ennemis a l’écran avec le maximum de pouvoir (capacité aussi possible dans la version arcade, mais plus similaire a un power up classique). Il y a donc un élément tactique non négligeable qui poussera à envisager si il est intéressant de sacrifier un peu de vie pour tuer plus rapidement les ennemis, et qui apporte une vraie originalité au titre. Le singe Bubbles (animal de compagnie de Michael IRL à l’époque qui n’est pas dans le film) est également présent pour indiquer au chanteur le chemin vers le boss de chaque zone une fois les enfants libérés. On peut aussi faire le moonwalk avec une combinaison secrète mais ça ne sert à rien. Michael pourra se transformer en robot, voiture ou vaisseau spatial dans la zone finale, comme dans le jeu d’arcade.



Pour les deux versions, la collaboration étroite avec Michael Jackson a permis d’avoir des réinterprétation d’excellente qualité des tubes du chanteur à la sauce Megadrive. Le son « métallique » emblématique du chipset audio retranscrit très bien les musiques choisies (surtout des morceaux cultes de l’album Thriller), permettant tôt dans la carrière commerciale de la console de démontrer ce qu’elle avait dans le ventre de ce côté là (ce qui ne sera pas toujours bien exploité, malheureusement). Avant la sortie du premier Sonic the Hedgehog, Moonwalker sur Megadrive était une vitrine technique indéniable du début des 16 bits, et a permis entre autres de définir l’identité plus « branchée » de la marque japonaise.
Présent dans les deux jeux, le niveau du cimetière a une particularité insolite ; la musique n’est pas Thriller, malgré le thème visuel évident. Laissant les joueurs perplexes durant des nombreuses décennies, un prototype avec Thriller version 16-bits a été découvert 20 ans plus tard, et la musique était bien présente mais a été retirée à cause des droits sur l’écriture qui n’est pas de Michael Jackson seul.
Il existe une autre adaptation du film sur micro ordinateurs très mauvaise et complétement oubliée, qui n’a rien à voir avec celle de Sega. Je la met ici pour être exhaustif.
Par la suite, Michael Jackson n’aura plus de jeux dédiés a sa carrière (mis à part le cynique Michael Jackson’s Experience, jeu de rythme sorti à la va-vite en 2010 pour surfer sur sa mort), mais fera des caméos plus ou moins improbables dans d’autres jeux Sega.
En 1992, Michael visite Sega Japon et teste leurs nouveautés. Il tombe particulièrement amoureux de la AS-1 Motion Simulator, une singulière borne servant de simulateur de vaisseau spatial. Sur son insistance, Sega l’inclurent dans le jeu alors en développement sur le support, Scramble Training. Il existe très peu d’archives au sujet de borne car tout contenu lié à celle ci était considéré perdu jusqu’à peu. La version « Michael Jackson » tout particulièrement était très peu référencée car retirée très vite des exposition où la borne été mise en place à cause des accusation d’agression sexuelle à son encontre la même année. Le fait que le AS-1 était trouvable uniquement dans les différents Sega World, des parcs d’attraction sur le thème du constructeur disséminés partout dans le monde, a rendu la conservation de celui ci très compliquée.


L’histoire est assez folle : recherché par les conservateurs de jeu vidéo en vain depuis des années, des cassettes contenant une copie des vidéos ont été retrouvée par hasard dans un marché aux puces en Angleterre en 2022, vendues par un ami d’un ancien membre de Sega Europe. Utilisant un format prioritaire propre à Sega, il était impossible de savoir si oui ou non le contenu était bien les fameuses séquences perdues jusqu’à trouver une personne capable d’extraire ces images, et éviter tout spéculateur/collectionneur voulant en garder l’exclusivité, ce qui se déroula heureusement sans encombres. Tout le contenu propre au gameplay (icones, HUD, etc), ou plus simplement le jeu lui même, est toujours considéré comme perdu, étant stocké sur des laserdisc.
Pour plus d’infos je vous conseille l’excellent article de Gaming Alexandria sur le sujet.


Ça, pour moi, c’est une référence a Gundam, mais on ne saura jamais.


Jackson devait également être un des personnages principaux de Megalopolis : Tokyo City Battle sur le même support, apparition aussi annulée à cause des accusations. C’était, contrairement à Scramble Training, une séquence animée sans aucune interaction où le « joueur » se met à la place d’un policier du futur et suit une courte course poursuite effrénée via la borne (sans doute avec tout ce qu’il faut de mouvements et vibrations). Ce projet est la première création de Tetsuya Mizuguchi, plus tard connu pour Space Channel (dont on reparlera dans la partie 2), Rez ou Tetris Infinite.


La séquence animée a été réutilisée dans le film d’animation The Gate to the Mind’s Eye, avec une bande son refaite pour l’occasion, ce qui nous permet d’en avoir une version en bonne qualité. Il existe d’autres séquences dans le CD de demo de Saturn « Sega Video Magazine« , l’épisode « Over Game » de l’Oeil du Cyclone sur Canal + ou dans le film « Otaku » de Jean Jacques Beineix.
Voici pour la première partie sur ce thème. Je m’arrête ici car la seconde partie devrait être également assez conséquente, notamment dû à la présence d’un certain hérisson bleu…
Une réflexion sur “Michael Jackson & Sega (Partie 1)”