Akira Toriyama & le Tori-Bot

Bien qu’ayant expérimenté avec le média dans son enfance, Akira Toriyama ne se destinait pas aux mangas, se dirigeant plutôt vers une carrière de dessinateur publicitaire de par sa passion du design et des véhicules (qu’il entretiendras toute sa carrière en dessinant fréquemment ses personnages dans des moyens de transports plus ou moins réels), il bifurque finalement au Shonen Jump a la fin des années 70 de par son impossibilité de s’adapter à une vie de salaryman.

Son premier manga (après une ribambelle d’histoires courtes) sera Dr Slump en 1980, l’histoire d’Arale, fille robot espiègle et excentrique, a la force incroyable, et de son créateur le Dr Norimaki, un scientifique génial mais extrêmement déviant passant la plupart de son temps à créer des inventions pour tenter de séduire la belle maitresse de l’école locale. Son style composé de dessins très détaillés basés sur l’humour visuel et des gags absurdes est complétement hors normes : Toriyama, n’étant pas spécialement fan de mangas, n’est pas influencé par les modes du moment qui voudraient plutôt voir des hommes très musclés se battre sur fond d’honneur et d’amitié ; ses inspirations viennent plutôt du cinéma américain populaire, des cartoons Disney, et des films de Jackie Chan. Dès le début, son œuvre est aussi caractérisée par les jeux de mots permanents sur les noms des lieux ou des personnages, voire même dans les dialogues qui mènent à des quiproquo délirants au centre de certaines histoires.

Dr Slump, ne se prenant donc pas du tout au sérieux, brise fréquemment le 4e mur. Arale détruit la terre plusieurs fois sans aucune conséquences, la temporalité des événements dépends du bon vouloir de l’intrigue, et les personnages sont souvent modelés autour des personnes gravitant autour d’Akira Toriyama, le plus connu étant le Dr Mashito, l’ennemi de Norimaki, qui est carrément crée sur la base de l’éditeur de Toriyama au Shonen Jump (ce qui sera parfois observé dans la série) après que celui ci lui ait demandé de faire un design de méchant « sinistre ». Toriyama lui même apparaitra souvent, parfois en début de chapitre pour introduire l’histoire, parfois dans l’histoire elle même (par exemple dans le chapitre 71 où il engage Norimaki pour crée un appareil qui lui permettras de respecter ses deadlines).

Se représentant d’abord comme un petit oiseau bleu (référence à Tori, voulant dire oiseau en japonais) où une version de lui masquée, il aime se tourner en dérision par son avatar voulant passer incognito dans son propre univers sans jamais y parvenir. Il s’arrêtera finalement sur un masque à gaz, qui évoluera sur un robot à pinces caractéristique qu’il utilisera toute sa vie pour se représenter, au point que sa présence est souvent un gag en elle même. C’est le « tori-bot ».

Dans toutes les œuvres créées par Toriyama, son avatar robot apparait. Dans Dr Slump donc, mais aussi dans Dragon Ball où il fait de fréquents caméos (surtout dans l’anime) et où il est considéré comme l’être le plus puissant de l’univers. Pour le sujet qui nous intéresse ici, le personnage est aussi présent dans des jeux vidéos !

Son apparition la plus notable dans Dragon Ball sera ce gag dans la saga de Boo.

Sa première incursion dans le monde vidéoludique sera également la plus notable. Travaillant sur le design de tous les monstres de la série Dragon Quest dès 1986, son trait caractéristique permet de donner vie à un univers 8bits très rudimentaire qui lancera la mode des RPG sur console. Il faut souligner l’invention du gluant (slime), devenu une mascotte iconique au Japon, connue de tous, ornant de nombreux produits dérivés depuis plus de trente ans. Malgré sa grande implication dans la saga, Toriyama, a ma connaissance, n’y apparait jamais directement.

Sa première apparition sera dans une fin cachée de Chrono Trigger, RPG culte de la SNES sorti en 1995, où toute l’équipe de développement a un petit message perso à nous délivrer. A la fin de la séquence, une porte s’ouvre pour rendre visite a la « dream team » : Akira Toriyama (designer de Dragon Quest), Nobuo Uematsu (compositeur de Final Fantasy), Yuji Orii (créateur de Dragon Quest) et Hironobu Sakaguchi (créateur de Final Fantasy), soit l’équipe de développement star responsable de Chrono Trigger. Toriyama laisse un message pour ses deux enfants, Sasuke et Kikka.


En tant que robot, sa première apparition sera dans Tobal n°1 en 1996. Ce jeu de combat 3D plutôt oublié développé par Squaresoft proposait une dizaine de personnages dont il a signé les designs. L’un d’eux est le Tori-Bot ! Il est nommé Trix en VO, mais a été renommé Tori dans la version occidentale. Pour Tobal n°2, plus de 200 personnages sont jouables ici (!), dont un Chocobo de Final Fantasy, mais surtout le retour de Trix/Tori et une nouvelle version, Super Trix. Pour débloquer tous ces combattants bonus, Tobal 1 & 2 proposent un mode « quête » très original où on doit naviguer dans des donjons pour débloquer les personnages cachés. Le second épisode aura carrément un semi monde ouvert avec gestion d’un inventaire où tous les ennemis peuvent être capturés pour être joués ensuite (d’où le nombre de personnages conséquents, beaucoup n’ont que deux ou trois coups, même si je trouve ça très marrant de pouvoir faire des combats « plante carnivore vs émeu » ou « magicien vs cougar »).


Dans le premier Dragon Ball : Budokai en 2002, Tori-Bot apparait dans le public de l’arène du tournoi des arts martiaux, accompagné de grand père Gohan et de personnages de Dr Slump. Il apparaitras aussi dans le second épisode.

Petite anecdote bonus parce que pourquoi pas : dans Budokai 3, Tori-Bot n’est plus là, mais on gagne Kaio, Mai, le président du monde, le public du tournoi de la saga Boo, mais surtout Luffy, Sanjy, Edward Elric et Envy !

D’après certains wiki, Tori-Bot apparaitrait dans Dragon Ball Online sur les écrans de chargement mais je n’ai aucun moyen de le vérifier : le jeu est fermé depuis 2011 et n’a jamais quitté l’Asie (il a servi de base pour Dragon Ball Xenoverse). Il apparait également en invocation dans l’increvable jeu d’arcade « Dragon Ball Heroes« , en tant que petit robot donnant des bonus de stats au joueur, mais je n’ai trouvé que des screenshot minables. Je les met quand même pour être exhaustif.


En 2007, Toriyama participe de nouveau a un RPG de Square Enix, Blue Dragon sur Xbox 360. En plus du design, il joue un personnage intégré au scénario principal, un marchand itinérant nommé Torippo. Vers la fin du jeu, il est possible d’avoir un dialogue caché où il avoue être un caméo de Akira Toriyama.

Dans la suite de Blue Dragon, Blue Dragon Plus sur Nintendo DS en 2009, Torippo est de retour, et il est maintenant jouable ! Il contrôle l’esprit Tarantula.

Dans le troisième épisode de la série, Blue Dragon: Awakened Shadow sur Nintendo DS en 2010, Torippo fait toujours partie de l’équipe. Il découvre ici son identité : un robot crée par une équipe de scientifique selon les souhaits d’Akira Toriyama après sa mort pour continuer son œuvre… Voilà voilà.

La seule vidéo de tout internet que j’ai trouvé avec cette séquence (enfin à part un let’s play allemand, mais bon).

En avril de cette année sortira un jeu SandLand, basé sur un de ses mangas moins connus, puis un Budokai Tenkaichi 4 a une date inconnue. Peut-être qu’un Tori-Bot fera son retour? Je serais là pour en parler, en tout cas !


Peut-être trahi par sa volonté de se représenter constamment au second degré, Akira Toriyama ne comprenait pas l’engouement autour de son œuvre, trop humble pour embrasser la célébrité ; pour lui ce n’était qu’un petit manga de combat sans grande profondeur. Mais c’est son humour, sa subtilité dans l’écriture des personnages, sa volonté constante de se réinventer par peur de la lassitude, qui ont permis a son œuvre de devenir immortelle.

C’est par exemple en voyant les foules en liesse regardant les derniers épisodes de Dragon Ball Super en direct qu’on comprends que Dragon Ball a touché la culture d’une façon unique.

Akira Toriyama a crée les codes du shonen moderne, et tous les auteurs de manga après lui se revendiquent de son influence (Eichiro Oda et Masashi Kishimoto se considèrent comme ses disciples). Dragon Ball a marqué la France a un niveau inégalable, lançant la mode du manga et des animes d’abord dans l’hexagone puis dans tout l’occident (Club Dorothée a été la première émission en dehors du Japon a le diffuser !). Songoku et le kamehameha sont des icônes de la culture connus de tous, le geste de son attaque fétiche est reconnaissable dans le monde entier, et la volonté de Goku de s’entrainer sans relâche pour se dépasser a inspiré des millions de personnes à donner le meilleur d’eux même. L’œuvre restera pour longtemps dans le cœur des fans. Merci sensei.

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